Les vents n'oublient jamais
te voilà le coupable
meurtrier de Jésus
maudit sois-tu le Juif
tu ne vivras pas parmi nous
pas de noble métier pas de fonction notable
destiné à flairer de ton nez redoutable tout commerce puant
l'anathème s'épand d'une souche tenace
l'obscur en fait son fiel
ainsi passe le temps
ainsi passe l'histoire
dans l'arrogante Germanie
on pense on rumine on fulmine on cogne
une gueulante folle abreuve le pays d'un mythe délirant
rafles camions baraques
des campagnes lointaines brusquement pétrifiées
s'embrument de convois ahanant vers la mort
à mains nues vers le ciel on mugit de partout
l'infâme maître d'œuvre voit que cela est bon
les barbelés ricanent au front des condamnés
pillages des valises avant l'heure d'abattage
insultes bestiales aux pouilleux dévêtus
bâtons chiens fusils gibets
l'urgence d'en finir manque d'eau et de pain
les seins des mères se vident en extrême oraison
neiges famines cris asphyxies brasiers
les cheminées débordent de bave frénétique
éructée jusqu'au ciel
le ciel qui n'en peut plus
en coiffe les forêts les ruisseaux les sentiers
en cimente la terre l'en faisant sa complice
dont le ventre se gorge jusqu'à la nausée
l'écho des agonies s'agrippe aux vents de l'est
se mêlant aux nuages dont les voiles meurtris
s'empalent aux miradors et cornent à la mort
ainsi passe le temps
ainsi passe l'histoire
ainsi flambe le noir
Suzanne