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mij2014
23 janvier 2014

5 personnages - Isabelle R

Ce soir-là, le bus avait cinq minutes de retard, à cause des travaux au nouveau rond-point à l’entrée de la ville, mais cela n’avait pas d’importance. Il fouilla dans sa poches et alluma sa cigarette au bord du trottoir. Il aurait pu traverser au rouge, mais il n’était pas pressé de rentrer. Inspira profondément comme s’il surplombait une vallée enneigée des Alpes au petit matin.

 La blonde portait une jupe violette et grise à froufrous et une blouse légère dont le décolleté manquait de maturité. Elle pouffait en essuyant la mayonnaise sur son menton. Elle remonta son lourd sac de cours sur son épaule et voulut s’élancer pour traverser la rue tant que le feu était au vert. Mais le petit talon en plastique noir de son bottillon dut accrocher un pavé descellé. « Jess !!! », cria son amie. Tous les pssants, les occupants de la terrasse bondée à cette heure, les passagers du 67 eurent le loisir d’observer la chute.

 Elle freina brusquement et lâcha : « Allez, avance ! Je conduis pas une Smart, moi ! ». A cette heure, elle avait l’habitude, c’était toujours la pagaille. Et les gens pensent qu’on peut freiner sur cinq mètres avec un bus accordéon bourré d’adolescents entassés dans toutes les positions, et sous la pluie en plus !... Comme chaque matin, le carrefour était bloqué et elle glissa  son bahut le long du trottoir et ouvrit les portes.

C’est un petit homme rondouillet, chauve sur le haut du crâne et avec de petites lunettes rectangulaires en métal. Pantalon brun ou gris, chemise informe et gilet sans manche à encolure en V. La caricature du petit commerçant. Un profil hors du temps. Son magasin de cigares et pipes est à son image : une petite tanière où l’on oublie la marche du monde, où l’on ne parle pas trop fort pour se concentrer sur les parfums et les sensations tactiles. Il baisse son volet tous les soirs à 18h précises.

 En ouvrant la portière, je suis saisi par un nuage de chaleur qui me fait transpirer d’un coup, malgré l’ombre des grands marronniers.  Je retourne dans l’habitacle et je rassemble les CDs qui risquent de souffrir si le soleil tourne. Je déteste la chaleur, et l’oisiveté qui l’accompagne.  Ma chemise est déjà humide.  Et la chaleur un dimanche, c’est encore pire… On va encore devoir supporter les odeurs d’allume-feu au pétrole et de saucisse grillée…

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